Le livre virtuel : un test peu concluant !

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La presse en avait parlé ici ou . Ce vendredi, je n’ai donc pas été surprise de trouver dans la newsletter du Monde… un polar. Plus précisément un feuilleton, car Muti, de Caryl Férey, est un court récit découpé en différents « épisodes »- et non chapitres, le vocabulaire choisi est déjà un révélateur.

En quelques mots, il est ici questions deux collègues, flics et amants, chargés d’enquêter sur la disparition du joueur vedette des Bafana Bafana, à quelques jours de l’ouverture de la Coupe du Monde. Mais assez parlé du fond, sur lequel je ne peux pas me prononcer : mon test fut de courte durée – et voilà pourquoi.

Premier problème : pour défiler à l’écran, le texte est découpé à l’extrême.  Une phrase, deux phrases, trois ou quatre dans le meilleur des cas… c’est bien court pour se plonger littéralement dans l’histoire.

Certes, l’on peut accélérer le rythme de façon manuelle, ou opter pour la « version texte » (qui affiche la page à l’écran dans son intégralité). Mais, dans le premier cas, le procédé devient fastidieux (imaginer devoir tourner la page toutes les deux phrases…), et dans le second, le « visuel » perd tout son intérêt : la page envahit l’écran – et fait disparaître une grande partie du décor – et l’on retombe dans une lecture linéaire. Bref, je ne vois pas de quelconque plus-value. 

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Deuxième problème : il est beaucoup de suppléments, d’applications, de bonus – je ne sais comment les dénommer. Plus précisément, le « lecteur » ou le « visonneur » est invité à cliquer sur des petites boules blanches qui scintillent un peu partout sur l’écran. Chacune d’elle s’ouvre sur un « complément » : un article de presse, le passé d’un personnage, un historique des lieux…  difficile de ne pas cliquer, ces éléments clignotent en permanence.

Or, plutôt que d’enrichir la lecture, ils se sont rapidement révélés comme de véritables parasites. Ils m’ont tout simplement fait perdre le fil, m’ont distrait et fait décroché de la trame elle-même. Non pas que ces éléments soient superflus sur le fond, mais ils m’ont semblé tout simplement gênants et contre-productifs.

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Conclusion : cette expérience m’a fait penser à la naissance d’un genre nouveau : le polar entre livre et série TV. J’aime autant les premier que les seconds, et pourtant… pas de plus-value, et, bien au contraire, une lecture brouillée. J’ai abandonnée dès la fin du 2e épisode, je n’étais tout simplement plus dedans. Le test est donc peu concluant, pour ne pas dire frustrant : j’ai désormais hâte de pouvoir lire ce polar (qui m’a l’air glauque comme je les aime en plus !)

L’avis d’In Cold Blog.  

« Muti », un polar de Caryl Férey à Cape Town
LEMONDE.FR | 20.05.10

© Le Monde.fr

Bonne plock à tous !



Au bord du Gange et autres nouvelles, par Rabindranath Tagore

9782070406043.gif « N’est-il pas intolérable que l’animal traqué se retourne et attaque le chasseur ?« 

Il est d’abord un spectre qui raconte à un jeune garçon sa triste histoire  (Le squelette). Il est ensuite un homme qui ne peut oublier l’amour de sa vie (La nuit suprême). Il est aussi un  vieil homme qui perd l’amour de son fils (Le gardien de l’héritage). Ou un fils égoïste qui refuse la générosité de son père (La clé de l’énigme). Ou encore une femme, qui porte un amour exclusif à son frère handicapé au point de mettre à mal son mariage (La soeur aînée). Ou cette autre jeune femme, devenue veuve à huit ans, et qui devient une ombre (Au bord du Gange).Voilà l’Inde traditionnelle, immuable, où rares sont ceux qui se révoltent contre la fatalité.

Il est tant de charme dans ce recueil qu’il m’est en vérité difficile de dire s’il s’agit bien de courtes nouvelles plutôt que de longs poèmes en prose. Ce n’est pourtant pas faute d’un grand respect du genre : de brèves histoires où des destins anecdotiques s’élèvent avec une intensité rare et se brisent dans des chutes parfois effroyables. Mais le récit se pare de tant de magie, de mystère, de grâce, qu’il m’a littéralement envoûte en dépit de sa cruauté.

Délicate, savoureuse, acidulée, les adjectifs me manquent pour qualifier la plume de Rabindranath Tagore. Le fait que la traductrice ait choisi de laisser certains mots dans la langue d’origine – tout en donnant le sens ou l’explication en bas de page – est particulièrement appréciable. Des phrases simples, qui coulent avec une grande douceur ; et c’est peut-être ce qui rend ce texte plus tragique encore.

Car la beauté de l’écriture n’a d’égale que la cruauté des histoires. Tagore dépeint le poids des traditions, le statut des femmes dans une société patriarcale (La soeur aînée, Au bord du Gange), les comportements les plus vils (Le gardien de l’héritage, La clé de l’énigme) et les amours impossibles (Le squelette, La nuit suprême), avec la même langueur et le même sentiment d’impuissance dans des fables sans morale.

« Le même soir, à l’autre extrémité du village, une ombre de mort planait sur l’humble demeure de la veuve, dénuée de pain et privée de fils. D’autres pouvaient oublier les incidents de la journée à la faveur d’un bon repas et d’une bonne nuit, mais pour elle, un tel événement dépassait en importance tout ce qui lui était donné de concevoir en ce vaste monde. Hélas ! Que pouvait-elle opposer à sa destinée ? Un corps décharné et las, et un coeur de mère sans aucun appui et à demi mort de frayeur« .

Difficile de ne pas recommander ce petit livre. Une très belle lecture, commune avec Soukee et Delphine. Egalement l’avis de Kathel.

Lu dans le cadre du challenge Bienvenue en Inde organisé par Hilde et Soukee.

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Bonne plock à tous !

 

Au bord du Gange et autres nouvelles, extraites du recueil Mashi, par Rabindranath Tagore (1925), traduit de l’anglais (Inde) par Hélène du Pasquier, aux éditions Folio (2010), 105 p., ISBN 978-2-07-040604-3.

 



Un rêve américain, par Norman Mailer

mailer.jpeg  « Un homme n’a jamais que du vide entre ses certitudes« .

Il était une fois à New-York, au début des années 60, un ancien héros de guerre reconverti en star du talk-show, marié depuis près de huit ans à la jolie fille d’un homme richissime… pour son plus grand malheur. Car ce n’est pas peu dire que Rojack et Déborah sont torturés. Ils ne se supportent plus, s’enivrent, s’insultent, se quittent, se retrouvent, jusqu’à la dispute de trop : Rojack la tue. Puis décide de déguiser son meurtre en suicide et d’appeler la police, avec laquelle il va jouer, non pas au mari éploré, mais au plus malin. Jusqu’à quand ?

Ainsi, Rojack, qui est aussi le narrateur, raconte, tout simplement, la dégénérescence de son mariage jusqu’au passage à l’acte fatal, et les nuits d’errance qui s’en suivent. Sans épargner personne – et surtout pas lui-même – il décrit de manière parfois abjecte sa descente aux enfers et ses tentatives pour se maintenir hors de l’eau, espérant trouver son salut dans les bras d’une chanteuse de Harlem.

Un rêve américain est un roman d’une noirceur extrême, tourmenté, douloureux, brutal. Certaines scènes prennent totalement aux tripes,  tandis que d’autres, plus lentes par comparaison, maintiennent dans un état de forte tension, malgré quelques longueurs. Aux interrogatoires de police se succèdent les mauvaises rencontres, des bas-fonds aux plus hautes tours de New-York, une New-York sombre, mafieuse, angoissante. 

L’écriture est sublime et le récit, aussi paradoxal que cela puisse paraître, aussi réaliste qu’onirique. Norman Mailer parvient à créer une ambiance cauchemardesque, du fait d’une violence quasi-permanente – mais le plus souvent contenue, latente, et toujours prête à exploser. Un monologue dont l’on ressort souvent secoué, et dans lequel je me replongeais avec autant d’appréhension que de plaisir.

« Tu m’aimes mon chou ? demanda-t-elle.

- Oui.

- Ca doit etre affreux. Parce que tu sais que je ne t’aime plus du tout. »

Elle le dit si tranquillement, avec un tel sens de l’irrévocable, que je repensai à la lune et à la promesse d’extinction qui était descendue sur moi. J’avais ouvert un vide – je n’avais désormais plus de centre. Comprenez-vous ? Je ne m’appartenais plus. Déborah avait occupé le centre.

« Oui, tu as de nouveau un air horrible, dit Déborah. Tu t’améliorais, à un moment, mais tu es redevenu affreux.

– Tu ne m’aimes pas.

- Oh ! Pas le moins du monde. ».

J’ai adoré cette lecture coup de poing, un bad trip à mi-chemin entre Blade Runner et Gang of New-York. Un Rêve américain, un livre (enfin !) exhumé de ma PAL grâce à une lecture commune avec Ingannmic !

Idéal pour préparer le Swap’in Follies de Manu et Amanda !

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Bonne plock à tous !

Un rêve américain (An American Dream), par Norman Mailer (1965), traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Alien, aux éditions Livre de poche (1967), 314 p., ISBN 2-253-01646-2. 



Un magnifique cadeau – avec en bonus, le couinement du dodo !

De retour de la côte atlantique – où j’ai eu l’occasion d’avoir une pensée pour les blogueuses de l’autre rivage – la grisaille lyonnaise me rattrape… alors, lorsque j’ai ouvert ma boîte au lettres à l’heure du déjeuner, ce fut une merveilleuse surprise !

Voilà en effet que m’attendait un colis en provenance du Québec justement ! Et, oui, je reconnais le nom de l’expéditrice, que j’ai eu la chance de swapper dernièrement : c’est Kikine ! Et de me demander : mais que cela peut-il bien être ?

Oh ! Un cadeau ! Et un cadeau magnifique !!!

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Un SLAT tout simplement sublime !!! Une pochette comme j’en rêvais depuis longtemps pour transporter mes livres sans les abîmer ! Bravo pour le choix des couleurs  – superbes – et pour la réalisation – parfaite : je suis complètement émerveillée !

Et la pochette comprenait une très jolie surprise : le recueil Un mariage à Lyon, signé Stefan Zweig, que j’avais très envie de lire après avoir vu l’avis de Kikine !

Merci mille fois Kikine !!! Ton cadeau m’a mis les larmes aux yeux (je dois être en vérité une grande sentimentale qui s’ignore…), je suis touchée et incroyablement émue, cela restera gravé dans mon petit coeur ! 

Et grâce à toi Kikine, je peux exercer dès aujourd’hui mon droit inaliénable à la couinerie de haut vol, consacré par Fashion et Bookomaton dans la présente charte !

.Un magnifique cadeau - avec en bonus, le couinement du dodo ! dans Swaps et cadeaux Charte

 Alors…*attention les yeux* : WOUAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !

Bonne plock à tous !

PS : Unblog me fait encore des misères, cette fois-ci pour l’insertion des images… Pffffff. Décidément, cette plateforme m’en fera voir de toutes les couleurs, va falloir faire quelque chose…



La lamentation du prépuce, par Shalom Auslander

auslander1.jpeg  « Dieu est ici, Dieu est là, Dieu est partout. Un point c’est tout. Alors, fais gaffe petit« .

Shalom est du genre très très angoissé. Élevé dans la plus stricte orthodoxie juive, il a développé une paranoïa pas possible envers un certain grand bonhomme tout la haut… Et à l’heure de devenir père lui-même, voilà que cette éducation lui joue encore des tours.  Il faut dire qu’entre l’école hébraïque ultra sévère et les travers de sa famille, la rupture avec les préceptes rigoristes de son éducation n’est pas des plus aisée. Shalom revient  ainsi sur les séquelles qu’il garde de son éducation extrêmement religieuse en expliquant les interdits, les contraintes, et surtout son rapport très personnel avec le Tout-puissant, ce Dieu revanchard et cruel avec qui il compte les points.

Le sujet est grave, mais le ton est léger, léger ! Une lecture facile donc, mais aussi une lecture intéressante en ce qu’elle donne à voir le tiraillement d’un jeune homme élevé dans un milieu austère et confronté à une culture occidentale permissive. Un récit sans concession, mais extrêmement divertissant du fait de son traitement complètement loufoque. 

Shalom Auslander oscille entre farce et émotion avec une habileté déconcertante. Il est tour à tour drôle, désespéré, corrosif, lubrique, inquiétant – mais drôle avant tout. Pour le dire autrement, La Lamentation du prépuce m’a fait l’effet d’un numéro d’équilibriste parfaitement exécuté. Hautement recommandé à ceux qui aiment rire utile !

« Mes professeurs m’ont appris qu’il est faux de dire que Dieu a provoqué l’Holocauste : en 1938, Il a simplement détourné la tête. Il a regardé ailleurs. « Hein, comment ? Géno quoi ? Vraiment ? Merde, j’étais au petit coin… ». Pas un meurtrier, non. Juste un complice par omission (…). Mes professeurs m’ont enseigné qu’un juif qui met la honte à ses coreligionnaires commet un péché que la mort venue d’en haut punira, et j’ai bien peur que ce récit entre dans ce cas de figure. Mais je respire un grand coup, et je me dis qu’Aaron Spelling va très bien, et si lui n’est pas un sujet d’embarras pour son peuple, je me demande qui peut bien l’être…« . 

Un grand plaisir de lecture pour lequel je remercie vivement Mango, qui a fait de La lamentation du prépuce un livre-voyageur ! Vous pouvez lire son avis ici, ainsi que ceux (enthousiastes, voire très enthousiastes) de Keisha, Liliba, Dasola, Miss Rose, Mazel, Plume, et ceux (plus, voire beaucoup plus mitigé) d’Emmyne, d’Elizabeth, de CécileSBlog.

Un récit qui m’en a rappelé un autre : Fuck America, d’Edgar Hilsenrath, les tribulations d’un juif new-yorkais rescapé de la Shoah, un sujet grave pour un traitement complètement déjanté.

Bonne plock à tous !

La Lamentation du prépuce (Foreskin’s Lament), par Shalom Auslander (2007), traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Bernard Cohen, aux éditions 10-18 (2009), 306 p., ISBN 978-2-264-04835-6 .



Swap Happy Face : le dénouement !

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Le swap Happy Face, organisé par Stephanie et Stephie, a tenu toutes ses promesses – et plus encore !

Par une froide journée de mai, ciel gris et grise mine… jusqu’à l’arrivée d’un gros colis !

J’affiche un grand sourire dès l’ouverture ! Le contenu se dévoile sous mes yeux ébahis, voyez avec quel soin ma swappeuse a emballé chacun des cadeaux… même Harry n’en revient pas !

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J’ai la banane devant… les livres !

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- La Septième rencontre, par Herbjorg Wassmo – rien ne me fait plus plaisir que de lire du Wassmo, et cette histoire d’amour a vraiment l’air à mon goût, c’est assez rare pour être souligné ! (pour la petite histoire, je l’avais initialement demandé en livre voyageur à Choco tellement je voulais le lire !)

- Le gang des mégères apprivoisées, par Tom Sharpe – rares sont les auteurs aussi loufoques que Tom Sharpe !

- Le bleue est une couleur chaude, par Julie Mahod – j’aime les histoires d’amour pas conventionnelles !

- A la une, à la deux, à la mort, et La prime, par Janet Evanovich – j’aime les polars bien déjantés !(et pour la petite histoire encore, Kikine me les a également envoyé du Québec en VO au même moment ! Je vais pouvoir me tâter à l’anglais dans des conditions idéales avec cette double lecture !)

J’ai encore la banane devant… les objets rigolos !

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Un éléphant qui lui pousse des cheveux – la coupe bientôt ! -, un oiseau-dodo-déco, et des marque-pages à tomber, que ma swappeuse a fait de ses mains ! J’en reviens pas, ils sont excellents ! 

J’ai toujours la banane devant… les gourmandises !

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Du chocolat aux fruits et au whisky !!! De la barbe à papa !!! Des chips à plein de goûts super sympas !!! Du thé vert parfait !!! Plein plein plein de bonbons !!! Et  même des colliers de bonbons !!! (enfin, c’est ce qu’il y avait à l’ouverture du colis, parce qu’à l’heure où j’écris ces lignes, il ne reste plus grand chose…)

Au final, un magnifique contenu (qui a envahi toute ma table – 90×90 quand même, il fallait le faire !!!)

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Un merveilleux colis, préparé avec soin par…  Lady Scar (Nadège) ! Tu es une swappeuse de rêve, tu m’as énormément gâtée, tu as su trouver juste sur tout, c’est… *wouaaaaaaah* – je parle plus, j’ai mal à la mâchoire… sauf pour te dire un énorme :

MERCIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII !!!!!!!!!!!!!!

 

Et un grand merci également aux organisatrices du swap Happy Face, sans qui tout ce bonheur ne serait jamais arrivé !

Quant à moi, j’avais très envie de donner le sourire à Kikine !

Bonne plock à tous

(et bon week-end ! Je m’envoie en l’air prends l’avion jusqu’à l’océan… de retour lundi !)



Debout sur la terre, par Nahal Tajadod

97827096307401.gif « Mais il y a eu ton père. Il ne voulait pas une épouse moderne, mais une femme libre« .

Voici un beau quatrième de couverture, mais qui, chose remarquable, n’en dit presque pas assez. « Il y a d’abord un père merveilleux, khan de vastes terres du Nord, grandes de trois mille âmes. Il voit soudain le voile des femmes tomber, les temps changer, bouleversant toutes les moeurs. Il y a sa fille, Ensiyeh, élevée comme un garçon, qui se bat pour son domaine et s’habille pourtant comme une héroïne de Tchekhov. Il y a Fereydoun, séducteur et fantasque, qui aime Enseiyeh et esquive avec grâce les folies des hommes et du pouvoir. Il y a Monsieur V., qui a connu la gloire et les grands hommes au service des Pahlavi et qui sera emporté par les tourments de Téhéran… Il y a la mort de la monarchie, les tourbillons de la révolution… Mais il y a surtout l’Iran – de l’Empire perse à la Révolution -, personnage central de ce roman foisonnant, parfois comique, avec les surprises prodigieuses de son histoire et la fin d’un monde qui se croyait immuable.« 

Téhéran, 1976. Fereydoun doit rencontrer Monsieur V., un homme influent et énigmatique. Il traverse la ville, sans cesse interrompu par des courses ou des souvenirs… Le récit est d’abord obscur, déroutant. Jusqu’au transport dans une province rurale, au début du siècle. Issa Khan est sans héritier. Alors, quand sa troisième femme lui donne enfin un enfant, peu importe qu’il s’agisse d’une fille. Enseiyeh sera élevée comme un chef de clan. Puis c’est la révolution – la première, celles des années 30 – l’occidentalisation brutale du pays. La naissance de l’Iran moderne, la fin du conte persan.

Retour en 1976. Toujours pas de Monsieur V. Les aventures de Fereydoun tournent au vaudeville, le récit se fait cocasse, très drôle même. Et c’est la rencontre avec Massoud l’électricien, qui pratique un Islam fondamentaliste en dissimulant son penchant pour les feuilletons à l’eau de rose. Les bases de la révolution – l’autre, celle de 1979 – sont posées, et le récit se fait sombre, clairvoyant, bouleversant.

Debout sur la Terre est donc un récit ambitieux, enchevêtré, parfois confus et fortement imbriqué dans les faits réels. Raconter l’Iran au siècle dernier et sous toutes ses coutures – la société tribale,  les superstitions, le passage à la modernité, l’insouciance, le fanatisme, et bien sûr, la condition des femmes – était certainement une gageure… Nahal Tajadod y parvient, mais non sans difficultés pour le lecteur.

Il est des lectures dont l’on ressort détendu, reposé – force est de constater que ce n’est pas le cas ici. Il faut s’armer de courage… mais cette histoire en vaut la peine. Car il est aussi des lectures dont on ressort plus fort, plus riche, totalement envoûté – et avec un regard différent sur le monde, d’une plus grande acuité. Et c’est vraiment le cas ici.

Pour les lecteurs persévérants, amoureux de contes orientaux ou férus d’histoire contemporaine, mais aussi pour les amateurs de fresques historiques et familiales qui donnent à voir un lieu et une époque – et à mieux comprendre certains enjeux actuels.

Tous mes remerciements à 51410427p.jpg et aux éditions JC Lattès pour ce partenariat !

Bonne plock à tous ! 

Debout la terre, par Nahal Tajadod (2010), aux éditions JC Lattès, 448 p., ISBN 978-2-7096-3074-0.



Echo Park, par Michael Connelly

connelly1.jpeg « Va falloir rester coolos« 

On ne présente plus l’inspecteur Bosch : flic à Los Angeles depuis de nombreuses années, il s’est toujours distingué par une ténacité à toute épreuve. La preuve encore avec le dossier Gesto. Voilà 13 ans que cette jeune femme a disparu, et 13 ans qu’il rouvre régulièrement le dossier de cette affaire non résolue… Et voilà-t-y pas qu’un serial killer jusqu’ici totalement inconnu s’accuse du crime ! Il faut dire que le procureur, en pleine période de réélection, lui propose un accord pour éviter la chaise électrique en échange d’aveux complets…

Michael Connelly est présenté comme un « maître incontesté du polar américain » – et ce n’est pas moi qui dirait le contraire ! J’avais dévoré Les Égouts de Los Angeles et La Blonde en béton quasiment en apnée, la mine déconfite au petit matin tant il m’était impossible de refermer le livre à des heures pourtant indécentes.

Totalement éprise d’Harry Bosch, je constate avec plaisir que Michael Connelly a eu l’intelligence de laisser mûrir son personnage avec les années (précisons que j’ai loupé quelques épisodes de la série) : moins taciturne, – un peu – moins alcoolisé, mais toujours aussi tête-brûlé ! Quant à l’enquête, elle est à la hauteur du personnage. Pour résoudre l’affaire Gesto, il va lui falloir déjouer les évidences et agir en électron libre, avec la bonne dose de pugnacité qui le caractérise.

Echo Park répond à tous les codes du genre : une intrigue claire et efficace, du parlé vrai, un rien de profilage, quelques bisbilles entre les services et des scènes d’action rondement menées, crédibles, réalistes – rien à dire.

Bref, Echo Park est un bon cru : Connelly connaît sa partition et déroule sans fioritures. Alors, oui, c’est assez formaté, oui, il n’y a rien de follement original dans cette enquête, mais oui, ce polar a parfaitement répondu à mes attentes : réduire les 4h de train Bruxelles-Lyon à peau de chagrin. Une lecture-détente et un brin sanguinolente de tout premier choix.


Lu dans le cadre du Défi Littérature policière sur les cinq continents organisé par Catherine.

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Lu également pour le Challenge Serial Killer organisé par Alcapone

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Bonne plock à tous !

Echo Park (Echo Park), par Michael Connelly (2006), traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Robert Pépin, aux éditions Points (2008), 429 p., ISBN 978-2-7578-0915-0 .


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Actus en vrac et en plock

 

De chouettes manifestations littéraires dans les semaines à venir… 

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Au passage également : la publication du Mag de Livraddict, un deuxième numéro sur le thème du polar. Toujours aussi bien conçu par la Team de Livraddict !

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Et un dernier pour la route pour les amateurs de livres les plus barrés. Au musée de l’Imprimerie de Lyon jusqu’au 27 juin se tient l’expo « Minuscules », consacrée aux livres mini mini mini…

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Voyez vous ça !

http://www.dailymotion.com/video/xc7gy4

 

Bon plock du dimanche à tous !

 



Voyage dans les ténèbres, par Jean Rhys

97820707736951.gif  « A chacun sa ration d’espoir« 

Anne est une jeune femme paumée (encore ! C’est décidément un thème récurrent ici, il va falloir y remédier fissa ! Bref). A la mort de son père, déjà veuf, cette fille de colons quitte ses Antilles natales pour l’Angleterre. Ce « retour au pays » est un déchirement dont elle ne parvient pas à se départir. Lâchée par sa belle-mère et sans grandes ressources, elle vit désormais au jour le jour, pension après pension, verre après verre, mauvaise rencontre après mauvaise rencontre.

Voyage dans les ténèbres m’a fait l’impression d’un anti-conte de fée. Voyez : une jolie petite nana, orpheline bien sûr, affublée d’une marâtre évidemment, qui vit dans le souvenir de son enfance – son âge d’or – et qui cherche un prince charmant… Et patatras. La vie – la vraie quoi ! – la rattrape rapidement.

Anne s’enfonce alors un peu plus chaque jour. Car elle se laisse en grande partie porter par les événements… comme lors de sa première nuit avec Walter – son premier amant, sa première passe.

« Il revint dans la chambre et je l’observai dans la glace. Mon sac était sur la table. Il le prit et mis de l’argent dedans. Avant de le faire, il regarda dans ma direction, mais crut que je ne pouvais le voir. Je me levai dans l’intention de dire « Qu’est-ce que vous êtes en train de faire ? », mais arrivée près de lui, au lieu de dire : « Ne faites pas cela », je dis : « Très bien, si vous voulez – tout ce que vous voudrez, comme vous voudrez » et lui baisai la main.«  

Un sombre roman initiatique qui se déguste rapidement – c’est court – et aisément – quel style ! Une écriture simple (qui dit pourtant beaucoup de choses), froide, distante, mais sans prétention aucune : je suis complètement sous le charme de la plume de Jean Rhys.

Pourtant, il a manqué quelque chose pour totalement me convaincre – et ce quelque chose est certainement de l’ordre de l’intrigue. L’auteur nous invite à investir l’esprit d’une jeune femme introvertie, passive, mélancolique, et qui sombre irrémédiablement dans une forme de dépression. Fatalement, elle finit par ne plus rien pouvoir faire, à peine tirée de sa torpeur par des rencontres hasardeuses et des frénésies d’achat grâce à l’argent de son amant.

La qualité de l’écriture m’a sauvé de l’ennui, mais pas du sentiment d’inachevé – sentiment qui se fait particulièrement criant à la fin du roman. Je ne voulais quitter ni l’auteur, ni son personnage… Il y avait là une belle matière, un style des plus savoureux, un sujet des plus prometteur, mais qui n’a pas été, me semble-t-il, suffisamment exploité ; un peu frustrant finalement ! 

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Un grand merci à Cécile qui m’a offert ce roman à l’occasion du Lady Swap organisé par Lou et Titine ! Et comme j’ai également offert ce roman à ma swappée, nous avions programmé une lecture commune pour ce Voyage dans les ténèbres : ici l’avis d’Emma.

Au passage, d’autres avis sur Jean Rhys : le billet de Malice sur ce titre (le seul trouvé à ce jour – y’en a-t-il d’autres ?), mais  aussi de Choupynette sur le recueil A septembre, Petronnella, et de Titine sur La Prisonnière des Sargasses (que désormais j’ai très envie de lire, car il semble bien plus consistant !).

Et pour celles et ceux qui aimeraient lire une histoire parallèle (certaines similitudes sont frappantes) mais dans laquelle l’héroïne prend, elle, son destin en main (et ce n’est pas peu dire !), j’ai très envie de suggérer la lecture de Dirty Week-end, d’Helen Zahavi. Une Anne prise de folie furieuse et qui accomplit violemment son destin… ça vaut le détour !

Bonne plock à tous !

    

Voyage dans les ténèbres (Voyage in the Dark), par Jean Rhys (1934), traduit de l’anglais par René Daillié, aux éditions Gallimard – Denoel, collection L’imaginaire (2005), 207 p., ISBN 2-07-077369-8.

 



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