Série Z, par J. M. Erre

 

97822830244471.gif  « Lecture sans répit, martyre de la vessie »

Félix est un type un peu minable qui passe ses journées : primo, à esquiver les attaques en règles menées par les femmes de sa vie, soit sa compagne, sa soeur, sa mère, sa fille ; secondo, à alimenter un blog consacré au cinéma bis sous le nom de docteur Z. Son rêve de devenir scénariste semble pourtant sur le point de se concrétiser. Mais son script  présente d’étranges similitudes avec la réalité…

Une histoire abracadabrantesque (mais très facile à suivre !) servie par une plume désopilante : il n’en fallait pas davantage pour provoquer des fous rires – de vrais fous rires ! – à presque toutes les pages. C’est bien simple : j’ai été contrainte de finir le livre au salon pour ne pas réveiller Mr Pickwick tellement je me gondolais et ne pouvais plus m’arrêter. Il faut dire que je suis sensible à l’humour absurde… et J. M. Erre est un maître en la matière !

C’est surtout bourré de trouvailles. En particulier dans l’écriture : récit proprement dit, extraits du script, page de blog, commentaires du blog, rapports de police, mails, journal tenu par Félix en cas perte de mémoire – sans oublier pause publicitaire et entracte…  L’intrigue est truculente, parce que c’est aussi un vrai polar, avec du suspens sur fond d’étranges disparitions. 

Série Z est farfelu au possible, loufoque à souhait, poilant jusqu’à l’overdose. Vraiment le livre le plus drôle que je n’ai jamais lu – j’espère ne pas placer trop haut les attentes en disant cela – et pour cette raison évidente un gros coup de coeur.

Ici les premières pages (ne pas s’en priver, ce serait dommage !)

« A une prochaine fois peut-être ? » demande J. M. Erre en épilogue… le peut-être est définitivement de trop !

L’avis de Keisha, que je remercie mille fois de m’avoir donné envie de lire ce livre (mes abdos ne te disent pas merci en revanche, mais, tsss, ça ne leur fait pas de mal !) qui a aussi chroniqué Prenez soin du chien que je vais m’empresser de dénicher !

D’autres avis très enthousiastes chez Alicia, Cathulu, Brize, Gwenaelle, Clara, Leiloona

Bonne plock à tous !

PS : je ne résiste pas au plaisir de faire voyager Série Z. N’hésitez pas à le demander !

 

Série Z, par J.M. Erre (2010), aux éditions Buchet/Chastel (2010), 365 p., ISBN 978-2-283-02444-7.

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Les enfants de la nuit, par Frank Delaney

97827491161982.gif « Ce que nous dénions, nous sommes condamnés à le subir« 

« Nicholas Newman, architecte londonien renommé, a vécu une relation passionnelle avec Madeleine, un femme fragile et mystérieuse, de quinze ans son aînée, dont il ne connaissait rien, ni son histoire ni son passé. Sans doute était-elle la femme de sa vie, mais il l’a compris trop tard : Madeleine a été assassinée dans d’étranges circonstances. Trois ans plus tard, Nicholas, qui ne s’est toujours pas remis de ce drame, prend quelques jours de repos dans un hôtel en Suisse. C’est là qu’il fait la connaissance d’un couple de riches hongrois, qui lui montrent quelques photos de la villa qu’ils sont en train de restaurer en Italie. Sur l’une d’elles, Nicholas reconnaît une tour Eiffel en améthyste, une pièce unique créée pour Madeleine, le seul objet dérobé par l’assassin après le meurtre. Dès lors, Nicholas, devenu la proie d’une série d’agressions, décide de lever le voile sur les secrets de Madeleine et de reprendre l’enquête sur sa mort. C’est le début d’un ténébreux voyage qui, de Londres à Venise en passant par New-York et Athènes, le conduira au coeur du cauchemar nazi et de ses expériences les plus inhumaines« .

Erreur de prénom mise à part – oui oui ! j’ai rectifié car notre architecte se dénomme bien Nicholas et non Michael – la présentation est tout à fait réussie en ce qu’elle jette très bien  les bases de l’intrigue. A une nuance près : Nicholas a beau devenir lui-même la proie d’une série d’agression, il hésite à lever le voile sur les secrets de Madeleine. Il tergiverse, il se lamente et se fait désirer…

Une réticence largement incompréhensible dès lors que tout a chacun aura vite fait de comprendre que tout cela n’est pas sans lien avec le meurtre sanglant de Madeleine – et plus largement, avec des activités menées par les nazis au début des années 40.

Heureusement, il est de nombreux événements qui captent déjà le lecteur. Et quand enfin les choses s’accélèrent, j’ai eu un mal fou à lâcher le livre… une irrésistible envie de savoir où tous ces éléments allaient mener.

Peu sensible à l’écriture, j’ai certes été agacée par des digressions pas possibles et des changements de sujet déconcertants. Mais force est de reconnaître que l’intrigue est audacieuse et – pour reprendre une expression convenue – savamment orchestrée. La dernière partie, rythmée, pleine de rebondissements, prend totalement à la gorge.

Voilà donc un thriller qui tiendra tardivement toutes ses promesses – j’entends par là une mise en route quelque peu laborieuse pour un dénouement en apothéose. 

Un thriller annoncé comme le premier volume de La Tétralogie de la nuit, une suite qu’il me tarde de lire en espérant retrouver le plaisir de lecture ressenti dans la seconde moitié du récit.

Je remercie la team de 49799387p1.png et les éditions du Cherche-Midi pour ce partenariat !

Les avis de Cecile,Clara, Keisha, Daniel Fattore.

Bonne plock à tous !

Les enfants de la nuit (The Amethysts), par Frank Delaney (1997), traduit de l’anglais (Irlande) par Hubert Tézenas (2010), 560 p., ISBN 978-2-7491-1619-8.    

 

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Orages Ordinaires, par William Boyd

97820210010371.gif  « Ne te tape jamais ta voisine, il se souviendrait de ça dans une prochaine vie« .

Il est parfois des lectures paradoxales que l’on souhaite ne jamais voir finir tant le plaisir est grand, et que, dans le même temps, l’on ne peut s’empêcher de dévorer tant le suspens est insoutenable. Ce fût le cas du dernier roman de William Boyd, Orages ordinaires, que je peux annoncer immédiatement comme étant un grand coup de coeur.

Le plaisir commence dès le quatrième de couverture, avec une présentation comme on aimerait en voir plus souvent. « Par un pur hasard, Adam Kindred, jeune climatologue spécialiste des nuages, se retrouve dépouillé en quelques heures de tout ce qu’il tenait pour acquis : sa carrière, sa réputation, ses cartes de crédit, son passeport, son portable, et même ses vêtements, soit tous les signes extérieurs de son identité humaine. Une succession de terrifiantes coïncidences fait de lui l’auteur tout désigné d’un meurtre. Police et tueurs à gage lancés à ses trousses, sa seule issue est d’entrer dans la clandestinité et de rejoindre la multitude de ces disparus qui hantent les grandes capitales mais demeurent indétectables sous les rayons inquisiteurs des radars sociaux. Entre ses poursuivants multiformes et insaisissables et ses frères de misères, Adam fait l’apprentissage cruel et fascinant de l’art de la survie à l’intérieur d’un Londres hors normes, peuplé de personnages fort inventifs face aux vicissitudes existentielles« …

Si les toutes premières pages peuvent être un peu déconcertantes, l’on comprend  très rapidement que l’on tient dans les mains un vrai bijou.

D’abord et avant tout pour la qualité de l’intrigue. Une narration alternée (encore !), qui permet de suivre la chasse à l’homme lancée contre Adam, le témoin gênant, par cet ancien militaire devenu mercenaire et orchestrée par les barons de l’industrie pharmaceutique.

Une intrigue bien construite et qui n’a rien d’insurmontable ! William Boyd sait doser les zones d’ombres, les révéler en temps utile, et créer une traque à couper le souffle sans jamais perdre son lecteur. Tout a du sens et tout s’éclaire au moment opportun. Il n’est ni imbroglio gratuit, ni mélo facile, en particulier à la fin – une fin étonnamment apaisante.

Orages Ordinaires, c’est aussi une ambiance, des personnages terriblement crédibles (mention spéciale à Ly-on, « petits petits pois ») et un style – magistral. Et une réflexion tout en finesse sur les enjeux de l’identité, de l’anonymat, du pouvoir, de l’éthique, de l’échelle sociale… bref, du chaos de la société moderne.

« Il s’offrit une douche dans la suite de la gare Victoria et se lava les cheveux pour la première fois en un mois ou presque. Il examina l’étranger barbu aux traits tirés qui le fixait dans le miroir tandis qu’il se coiffait et fut frappé par la force des sentiments contraires qui l’habitaient : une vive fierté devant sa résilience et son ingéniosité, un amer apitoiement sur soi-même à l’idée qu’il avait pu en arriver là. Oui, je suis libre, songea-t-il, mais que suis-je devenu ?« .

Un thriller qui se déguste aisément tout en donnant à réfléchir sur le monde qui nous entoure. J’en redemande ! Merci à L’Ogresse, grâce à qui j’avais repéré ce titre !

Et je remercie bien sûr Alapage pour l’envoi du roman Orages Ordinaires de William Boyd, un auteur dont je ne vais certainement plus me passer ! 

Bonne plock à tous !

 

Orages Ordinaires (Ordinary Thunderstorms), par William Boyd (2009), traduit de l’anglais par Christiane Besse, aux éditions du Seuil (2010), 476 p., ISBN 978-2-02-100103-7.

 



Turpitudes, par Olivier Bocquet

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Rencontré à l’occasion du festival Quais du polar, Olivier Bocquet avait su m’intéresser. J’avais donc acheté son premier livre ; c’était moins l’intrigue qui m’avait tenté que notre goût commun pour Tom Sharpe et Jasper Fforde.

Et j’en avais presqu’oublié Turpitudes… quelle erreur ! Ce polar a été primé par des internautes plein de sagacités. Et dispose d’un quatrième de couverture digne de ce nom.

« Décembre 2003. Fontainebleau fait la une des journaux à trois reprises : un meurtre particulièrement barbare trouble la quiétude des habitants ; une émeute sanglante secoue la ville ; et, pour la première fois en France depuis le XIXe siècle, une épidémie de dysentrie se répand dans les rues comme une traînée de poudre. Ce que la presse ignore, c’est que ces trois évènements sont liés… ».

La question qui se pose (et à laquelle répondra parfaitement l’auteur !) est  »comment en est-on arrivé là ? » … et j’aimerai beaucoup en dire davantage, mais la découverte de l’intrigue fait partie intégrante du plaisir de lecture ! Je m’abstiens pour le laisser intact…

Mais tout de même : Turpitudes est construit sur une narration alternée particulièrement habile. Des chapitres courts, qui croisent les voix de personnages liés entre eux d’une manière ou d’une autre. Des personnages bien foutus, pas toujours crédibles dans leurs actes, mais qui ne laissent pas indifférents. Tour à tour, on les soutiens, on les moque, on les conspue… et surtout, on décolle progressivement les étiquettes que leurs diverses origines sociales leur avaient imprimé.

Voilà une intrigue vraiment bien construite - et j’en veux pour preuve ce signe qui ne trompe pas : les pages se tournent à une vitesse prodigieuse. Parce que c’est fluide, très bien écrit, totalement captivant.  Mais aussi très réaliste, dérangeant, amer et, en même temps, bourré d’humour.

Bref, un polar bigrement intelligent que je recommande très volontiers.

Bonne plock à tous !

PS : comme il s’agit d’un premier roman, petite présentation de l’auteur    photo03111.jpg

« Olivier Bocquet est né à une époque où l’on considérait sans rire qu’il était possible d’aménager son salon avec des meubles gonflables. Il ne s’en est jamais vraiment remis. Issu du croisement entre un french lover et une correspondante anglaise, il babille bilingue très tôt : sa première question est : « pourquoi not ? » (…). L’apprentissage de la lecture lui est fatal : depuis lors, il vit dans la fiction. C’est pourquoi, de manière générale, il vaut mieux se méfier de ce qu’il raconte« . 

Turpitudes, par Olivier Bocquet (2010), aux éditions Pocket, 338 p., ISBN 978-2-266-20071-4.



La Ville insoumise, par Jon Fasman

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Jim, américain à la trentaine bien sonnée, sent qu’il est en train de rater sa vie. Après un échec sentimental, il est rentré travailler dans le petit boui-boui de ses parents. Il boit trop, il joue trop, et, face à une importante dette de jeu, il prend le parti de s’expatrier en Russie – dont il connaît la langue et la culture par ses grands-parents qui ont fui, en leur temps, le régime soviétique. Désormais installé à Moscou, Jim va travailler pour la Fondation de la Mémoire qui s’attache à faire la lumière sur le sombre passé de ce pays.

En dépit de ce qu’annonce le quatrième de couverture, nous ne sommes pas dans un thriller. J’étais pourtant prévenue, mais vu le temps qu’il m’a fallu pour rentrer dans le livre, et le peu de suspens qui s’en dégage, j’ai pu humblement le vérifier par moi-même. Nous sommes plutôt à mi-chemin entre le roman d’espionnage et le roman noir – pour ne pas dire complètement obscur.

L’intrigue m’a semblé gratuitement complexe. Il est d’un côté d’importantes longueurs, et même des chapitres entiers inutiles (et là encore, j’étais prévenue !). Il est de l’autre des explications de texte qui m’ont cruellement manqué. Et ce n’est pas faute d’apprécier les imbrogliami politico-mafieux - auxquels il fallait légitimement s’attendre pour une intrigue située dans la Russie actuelle.

L’auteur a pris le parti de laisser volontairement le lecteur dans le flou sur des personnages et des situations « clés ». Au début, c’est plutôt intriguant. A la longue, cela devient lassant. Et à la fin du roman, c’est carrément frustrant. 

Une lecture déroutante, que j’ai failli abandonner à plusieurs reprises, et malgré tout tenue par l’espoir d’une clarification et d’un dénouement salvateur. En vain. La considération portée aux liens entre générations (et par-delà l’hommage rendu aux aïeux), et la description de la Moscou d’aujourd’hui restent les seuls aspects positifs du récit à mes yeux.

La Ville insoumise est un livre-voyageur qui est passé par moi grâce à Keisha que je remercie vivement ! Vous pourrez lire son billet ici, ainsi que celui de Lapinoursinette, et les nombreux avis (pas très positifs !) recensés chez BOB.

Bonne plock à tous !

La ville insoumise (The Unpossessed City), par Jon Fasman (2008), traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Madeleine Nasalik, aux éditions du Seuil (2010), 378 p., ISBN 978-2-02-097732-6.



L’invisible, par Stella Rimington

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« Selon le jargon de la CIA, le terme «invisible» désigne un terroriste qui a la nationalité et l’ethnie du pays choisi pour cible. Liz Carlyle, de la section antiterroriste du MI5, apprend que la Grande-Bretagne va être infiltrée par un «invisible». Dans le même temps, un jeune indic pakistanais lui signale des mouvements suspects dans une librairie islamiste fondamentaliste de Londres. La menace existe assurément, mais Liz ignore le lieu, la date et la nature de l’attentat…
Dans la veine des classiques du roman d’espionnage, terrain privilégié du suspense, de l’angoisse et du double jeu,
L’Invisible détient une carte maîtresse : l’auteur domine mieux que quiconque le sujet, pour avoir occupé pendant cinq ans le poste de directeur général du MI5« .

La couverture et le quatrième de couverture ne rendent vraiment pas justice à ce polar très réussi. Du classique roman d’espionnage, il est évidemment question, mais pas seulement : ce livre a largement rempli son contrat en dépassant même mes attentes.

La construction du récit est exemplaire. L’intrigue, qui pourrait sembler complexe de prime abord, est riche sans être confuse. D’un côté, l’arrivée d’un Pakistanais sur le sol britannique. De l’autre, du rififi dans le milieu du banditisme. Le puzzle se met en place à une allure idéale, ni trop rapide (c’est précis, crédible, cohérent), ni trop lente (c’est prenant, rythmé, bien calibré). On va de surprise en surprise, et ce jusqu’à la fin. De quoi tirer un excellent film du genre, me suis-je d’ailleurs dit en passant.

Le monde des renseignements semble rendu tel qu’il est : des tensions entre les services, des intuitions, des recoupements ténus et même d’heureux hasards. Ses membres ne sont jamais présentés comme des machines froides ou des warriors à toute épreuve. Liz, par exemple, a un sacré caractère, un amant, des coups de génie et des coups de blues. Rien de plan-plan donc du côté des personnages, les caractères sont assez fouillés, notamment celui de l’Invisible qui se dévoile progressivement. 

Et l’ambiance n’est pas négligée, bien au contraire. L’atmosphère brumeuse de la campagne anglaise (puisque c’est le cadre principal du récit – contrairement à ce que la couverture pourrait laisser croire) est magnifiquement rendue. Ses pubs miteux, ses snobinards et ses paumés, ses plages et ses paysages à perte de vue… de quoi séduire au-delà des amateurs de polar.

A lire absolument pour les adeptes du genre donc, mais pas seulement ! C’est même certainement le livre que je conseillerais pour (re)découvrir les romans d’espionnage. Une enquête très actuelle, qui sonne terriblement juste et sans une once de manichéisme. Et le fait que le personnage principal soit une femme ne gâche rien au plaisir bien sûr ! Bref, un très bon polar comme j’aimerai tellement en lire plus souvent !

Un grand merci à la Team de 47286519 et aux éditions Le livre de poche !

D’autres avis très positifs chez Nathalie, Flof13 et Lagrandestef, un peu plus mitigé chez Véro.

Bonne plock à tous !

PS : mon billet enthousiaste ne doit rien au fait qu’il s’agisse d’un partenariat – j’ai d’ailleurs lu le livre avant les derniers évènements blogosphériques. Précision certainement inutile (je ne me suis pas gênée pour indiquer que certains livres reçus m’ont déçu ici ou ) et justification que je déplore dans le principe… mais autant le faire une fois pour toute. 

L’invisible (At Risk), par Stella Rimington (2004), traduit de l’anglais par Johan-Frederik Hel Guedj, aux éditions Le livre de poche, collection Thriller, 472 p., ISBN : 978-2-253-11615-8.



Le Livre des morts, par Glenn Cooper

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« New-York, mai 2009. Six morts violentes se succèdent en quelques jours. Les modes opératoires sont différents, les victimes n’ont aucun point commun, hormis celui d’avoir reçu quelque temps plus tôt une carte postale de Las Vegas, avec une simple date, celle du jour de leur mort. Très vite, la presse s’empare de l’affaire et celui qu’elle surnomme le « tueur de l’Apocalypse » a tôt fait de semer la psychose dans la ville. Les autorités, désorientées par l’absence d’indices, se tournent vers Will Piper, ancien profileur d’élite dont la carrière a été brutalement interrompue… » (le quatrième de couverture en dit certainement trop selon moi, donc je coupe).

Le Livre des morts est un polar qui démarre vite – comme j’aime. Une victime (brrr…), deux victimes (rebrrr…), et un nouvel enquêteur que l’on met sur l’affaire.

Will Piper est un type bourru et séduisant - comme j’aime. Un caractère à prendre avec des pincettes et une carrière au FBI mise à mal par ses frasques d’homme à femme, un gros penchant pour l’alcool et un refus du politiquement correct. Affublé d’une prometteuse collègue, les voilà parti… Une enquête et des personnages intéressants, tout pour me lancer plus en avant avec envie.

Mais rapidement, je commence à être quelque peu décontenancée par la construction du récit. Chaque chapitre ou presque est un passage dans la porte temporelle… Là il faut que je m’explique. C’est une chose de revenir sur le passé universitaire de Will ou d’être transporté sur l’île de Wiht dans le haut Moyen-Age ; c’en est une autre de faire des allers-retours de quelques semaines dans le présent. Ils sont bien plus déstabilisants que les grands sauts de le temps… Ce n’est pas tant la répartition de l’intrigue sur trois grandes périodes qui m’a gêné – bien au contraire – mais plutôt le flottement dans le passé tout récent. Contrainte de repérer les dates (à quelques semaines près donc), de revenir en arrière pour vérifier le timming de l’intrigue, je suis – comment dire – un poil agacée, oui.

Bientôt d’ailleurs, le passé et le présent se rejoignent. Bientôt, on finit par faire facilement le lien. Mais bien trop tôt peut-être… une fois les rapports établis entre le Moyen-Âge et le XXIe siècle, c’est toute l’intrigue qui est percée à jour. Alors, oui, j’aime beaucoup deviner la fin et entrevoir la solution dans les polars. Oui, mais pas à la moitié du récit… surtout quand la fin ne réserve finalement pas de nouvelles surprises - ou trop peu. Après l’agacement, l’ennui…

Quand au fond mystique, j’ai encore beaucoup du mal à y croire (mais il est vrai que ce point là est sûrement très personnel ; toujours est-il qu’un polar pas convaincant, c’est vraiment balot).

Et que dire du final à l’américaine qui a fini de m’achever…

Dommage, vraiment dommage, parce c’est finalement assez bien écrit – ça se lit vite et certains chapitres sont vraiment très prenants – et que réflexion et action sont vraiment bien dosées.

Un grand merci quand même à l’équipe de blog_o_book et aux éditions Le Cherche-Midi !

Un avis plutôt positif chez Cryssilda et chez Cathulu, un avis très positif chez Neph et chez Gio, un avis très mitigé chez Amanda et chez Pimprenelle… décidement !

Bonne plock à tous ! 

 

Le Livre des morts (Library of the Death), par Glenn Cooper (2009), traduit de l’anglais (États-Unis) par Carine Chichereau, aux éditions Le Cherche-Midi (2010), 420 p., ISBN 978-2-7491-1665-5.



Mort à la Fenice, par Donna Leon

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C’est Chocolatée (SBF) qui m’a proposé cette lecture dans le cadre du Challenge Caprice et je l’en remercie ! Pas de (mauvaise) surprise dans son choix. Mort à la Fenice est un polar de bonne facture qui correspondait parfaitement à mes attentes du moment.

Une lecture vraiment sympa, en particulier grâce au cadre de l’intrigue - Venise, son brouillard impossible, ses  maisons introuvables dans ses ruelles étroites, ses bateaux-bus sur ses légendaires canaux (et sa non moins légendaire corruption), une belle matière dont Donna Leon a su tirer parti. De quoi entrevoir la Sérénissime sans s’ennuyer un instant.

Dès les premières pages, j’ai plongé très facilement. Nous sommes donc à la Fenice de Venise, et la représentation de La Traviata doit reprendre après l’entracte sur son troisième et dernier acte. Mais le chef d’orchestre ne réapparaîtra jamais : il est retrouvé mort dans sa loge.

L’enquête commence alors de manière presque trop conventionnelle. Elle est même un poil mécanique dans les 50 ou 60 premières pages. On suit, jour par jour, heure par heure, le commissaire Brunetti explorant les premières pistes, se penchant sur le noir passé du chef d’orchestre, temporisant la presse et sa hiérarchie.

Les interrogatoires sont même rendus par le détail : le moindre regard fuyant, la moindre hésitation dans une réponse, l’étonnement ou l’agacement du suspect, tout cela nous apparait avec précision, rendant le récit très « visuel ». Je ne serai pas étonnée de voir ce polar adapté à l’écran, tout est déjà présent !

Puis, passé la centaine de pages, Mort à la Fenice prend défintivement son envol. Les personnages prennent enfin de l’épaisseur : les suspects d’abord, le mort ensuite, le commissaire Brunetti enfin. Lui, qui m’apparaissait presque insipide jusqu’ici, gagne en profondeur à mesure que son enquête avance. Sa réserve, sa sobriété, sa perspicacité dans l’analyse des comportements humains en font un personnage bigrement intéressant.

Et surtout, les pistes, jusqu’ici savamment distillées, vont progressivement se resserrer. Pas de courses poursuites effrenées, tout est question d’observation, de déduction et de recoupement. Et le dénouement est juste parfait, convaincant et même si pas très surprenant pour qui a lu entre les lignes !

Encore une fois, un polar de bonne facture ; et il y a de fortes chances de me voir tourner de nouveau autour d’une enquête signée Donna Leon pour une lecture de détente !

Lu dans le cadre du challenge Caprice organisé par Cocola’s

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Bonne plock à tous !

Mort à la Fenice (Death at La Fenice), par Donna Leon (1992), traduit de l’anglais par William Olivier Desmond, aux éditions Points, 284 p., ISBN 2-02-034037-2. 



Mêlée ouverte au Zoulouland, par Tom Sharpe

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Mêlée ouverte au Zoulouland est certainement l’un des livres les plus explosifs qu’il m’ait été donné de lire. 

Tom Sharpe a choisi de dénoncer l’apartheid sur un mode tragi-comique, option trash. Un récit à l’image du système sud-africain que l’auteur a connu dans les années 60-70 : cru, cruel, violent, mais aussi totalement grotesque.

Dans la petite ville de Piemburg, il est des flics médiocres. Tout spécialement le kommandant van Heerden - précieux et ambitieux, certainement le seul boer du pays follement mordu des anglais – et le konstable Els, dit le Tueur-de-Caffre, une brutasse finie, doublé d’une crétinerie très avancée. Et il est aussi une notable d’origine britannique qui vient s’accuser du meurtre de son cuisinier zoulou…

« La loi dit qu’il est criminel de tuer des Caffres hors de chez soi. Mais la loi dit aussi qu’il est tout à fait admis et correct de les tuer à l’intérieur« . Or, impossible de convaincre cette vieille Miss Hazelstone, aussi autoritaire qu’excentrique, de déplacer le corps de l’homme qui gît, en mille morceaux, sur sa pelouse… mais ce ne sera pas l’ultime tocade de l’ancienne qui fera tourner en bourrique la police de la ville jusqu’à plus soif.

« Miss Hazelstone répondait au quart de tour à toutes les provocations. Elle se leva et pointa le fusil vers le parc. Le kommandant n’avait pas prévu qu’elle tirerait. Le konstable Els, pour une fois, fit preuve de plus de perspicacité et se jeta par terre. Que l’endroit qu’il choisit fût déjà occupé par un énorme doberman Pinscher ; que le chien en question choisit de refuser au konstable le droit de se vautrer sur lui (…) ; tout cela échappa au kommandant Van Heerden quand Miss Hazelstone, visant un coup en l’air, puis un coup au sol, appuya sur la gachette (…). La fin du monde n’était plus proche : elle venait d’avoir lieu (…). Au centre de la pelouse, le coup de fusil avait ouvert une tranchée (…) dont les bords en dents de scie laissaient échapper ce que le kommandant espérait de tout coeur n’être que de la vapeur« .

Une mêlée ? Un énorme capharnaüm oui ! Force est de reconnaître qu’il n’y a pas tromperie sur la marchandise. Mais tout m’a semblé passablement brouillon. Les rebondissements s’enchainent à une vitesse prodigieuse, au point que l’action en soit parfois difficile à suivre. Il m’a parfois fallu revenir en arrière pour retrouver le fil des évènements… Et il est des quiproquos à gogo auxquels j’ai fini pas ne plus croire.

C’est d’autant plus dommage que l’on retrouve finalement tous les ingrédients qui constituent aujourd’hui la Sharpe‘s touch : la dérision loufoque dans le ton, l’imbroglio jouissif dans l’intrigue, la satire violente dans le propos.

« - Vous venez souvent par ici ? demanda-t-il.

- A la prison ?

- En Afrique du Sud. Encore que ce soit presque la même chose« .

Il me reste à espérer que la suite de ce premier roman, Outrage public à la pudeur, soit un peu mieux construite… mais tout aussi débridée !

 

Lu dans le cadre du Challenge Safari littéraire organisé par Tiphanya

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Challenge accompli !

Ce fut mon auteur non-africain pour une intrigue située en Afrique, après avoir chroniqué les Poèmes Perdus de Léopold Sédar Senghor comme auteur africain.

Et pour prolonger le plaisir, j’ai fait un tour le blog tenu par le journaliste Sebastien Hervieu installé dans ce pays : l’Afrique du Sud en couleurs. Vraiment très sympa.

Bonne plock à tous !

Mêlée ouverte au Zoulouland (Riotus Assembly), par Tom Sharpe (1971), traduit de l’anglais par Laurence, aux éditions 10-18, collection « domaine étranger », 310 p., ISBN 2-264-01406-7.



Duel en enfer – Sherlock Holmes contre Jack l’Eventreur, par Bob Garcia

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Ce fut un plaisir de recevoir le dernier livre de Bob Garcia, Duel en enfer, Sherlock Holmes contre Jack l’éventreur, pour mon premier partenariat organisé par Livraddict. Et ce fut également un plaisir à la lecture !

Comme le veut l’usage, d’abord le résumé fourni par le quatrième de couverture : « Londres, été 1888. Sous le poids d’une chaleur suffocante, la ville est saisie d’horreur par les premiers meurtres de celui qu’on nommera bientôt « Jack l’Éventreur ». Pourtant, aucune enquête du célèbre Sherlock Holmes ne mentionne le plus fameuse affaire criminelle qui a agité ses contemporains. Bien des années plus tard, le docteur Watson confia à son éditeur le journal de l’investigation qu’il mena aux côtés du détective sur l’insaisissable tueur en série. Une terrible plongé dans l’enfer des bas-fonds londoniens, sur les pas du meurtrier le plus sanguinaire et le plus énigmatique que l’Angleterre ait connu« .

Ce n’est pas peu dire que j’attendais l’auteur au tournant. Mettre ses pas dans les pas de Conan Doyle, rien que ça ! D’autant que Bob Garcia reprend toutes les ficelles originelles, à commencer par le point de vue, puisque l’histoire nous est contée par ce fidèle Docteur Watson. L’entrée en matière est plutôt classique - un journal inédit concédé à un éditeur à la mort du détective - but why not ? Plus largement, l’auteur reprend l’essentiel des clés qui ont fait le succès de Sherlock Holmes. Si ce n’est pas toujours finement amené, je n’ai pas pu m’empêcher de penser qu’il ne pouvait que difficilement faire autrement…

J’avais donc placé haut mon degré d’exigence ; or, malgré certaines réserves, j’ai plongé dans l’intrigue sans me retourner et avalé ce polar d’une traite. Impossible de m’en décrocher avant de l’avoir terminé. Et de me demander alors : y’a-t-il un meilleur signe pour reconnaître un bon polar ?

Alors, soyons tout à fait honnête, il est certaines choses qui m’ont un peu dérangé. D’abord, le glauque à outrance : les bas fonds de Londres, la prostitution, la misère humaine… tout cela m’a semblé très racoleur. Ensuite, les angoisses existentielles et autres déboires sentimentaux de Watson, qui n’apportent pas grand chose au récit - voire qui le parasitent parfois.

Et surtout, l’impression d’une construction un poil bancale : l’enquête n’avance pas des masses pendant une bonne partie du récit, pour se précipiter ensuite. Les maigres indices et les pistes vagues ne permettaient pas de se faire la moindre idée du dénouement. Certains apprécieront peut-être… j’ai pour ma part vraiment regretté de ne pas pouvoir échaffauder le moindre début de commencement d’une petite hypothèse, ce que j’aime par dessus tout avec les polars !

Malgré tout, ça a bigrement bien marché. Pourquoi, comment ? Je me l’explique mal… A la réflexion, je crois que mon léger agacement a été très largement compensé. D’une part, par l’action : si l’enquête s’enlise, ce n’est pas faute, pour Holmes et Watson, de se démener. Les interrogatoires, les filatures, les poursuites, les confrontations… tout cela donne énormément de rythme au récit. D’autre part, par l’ambiance : Bob Garcia a su dépeindre une atmosphère et offre un récit très imagé. J’ai voyagé en fiacre, foulé le pavé humide, erré dans le brouillard londonien à la nuit tombée… 

Enfin, j’ai totalement adhéré au dénouement, surprenant mais convaincant. Et, cerise sur le gâteau : la postface de l’auteur, entre fiction et réalité, qui pourrait ne pas plaire à tout le monde… et c’est justement ce qui m’a plu !

Je remercie donc les éditions jailu.jpget la Team de 47286519 pour cette lecture très plaisante !

Alicia a partagé mon enthousiasme, La liseuse également, mais Matilda et Soukee beaucoup, beaucoup, moins !

A noter : Bob Garcia sera présent au festival Quais du polar !

Bonne plock à tous !

Duel en enfer – Sherlock Holmes contre Jack L’Eventreur, par Bob Garcia (2008), aux éditions J’ai Lu, 667 p., ISBN : 978-2-290-01888-0.



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