C’est pas la plock 14 mars
Jean Ferrat bien sûr.
Mais… poésie, amour, politique, nature, mémoire ?
Mémoire.
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Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés
Qui déchiraient la nuit de leurs ongles battants
Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent
Ils se croyaient des hommes, n’étaient plus que des nombres
Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés
Dès que la main retombe il ne reste qu’une ombre
Ils ne devaient jamais plus revoir un été
La fuite monotone et sans hâte du temps
Survivre encore un jour, une heure, obstinément
Combien de tours de roues, d’arrêts et de départs
Qui n’en finissent pas de distiller l’espoir
Ils s’appelaient Jean-Pierre, Natacha ou Samuel
Certains priaient Jésus, Jéhovah ou Vichnou
D’autres ne priaient pas, mais qu’importe le ciel
Ils voulaient simplement ne plus vivre à genoux
Ils n’arrivaient pas tous à la fin du voyage
Ceux qui sont revenus peuvent-ils être heureux
Ils essaient d’oublier, étonnés qu’à leur âge
Les veines de leurs bras soient devenues si bleues Les Allemands guettaient du haut des miradors
La lune se taisait comme vous vous taisiez
En regardant au loin, en regardant dehors
Votre chair était tendre à leurs chiens policiers
On me dit à présent que ces mots n’ont plus cours
Qu’il vaut mieux ne chanter que des chansons d’amour
Que le sang sèche vite en entrant dans l’histoire
Et qu’il ne sert à rien de prendre une guitare
Mais qui donc est de taille à pouvoir m’arrêter ?
L’ombre s’est faite humaine, aujourd’hui c’est l’été
Je twisterais les mots s’il fallait les twister
Pour qu’un jour les enfants sachent qui vous étiez
Vous étiez vingt et cent, vous étiez des milliers
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés
Qui déchiriez la nuit de vos ongles battants
Vous étiez des milliers, vous étiez vingt et cent
Paroles et musique de Jean Ferrat.
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Mango, Schlabaya, Lystig, Tinusia, La plume et la page et George lui rendent aussi un bel hommage dans le cadre des dimanches poétiques de Celsmoon, tout comme Malika sur son joli blog.
Bon plock du dimanche quand même.
keisha 14 mars
Moi qui croyais que les plus jeunes ne le connaissaient pas… Je découvre que si, et qu’on l’aimait. Quelle voix! Quels textes! J’ai un vinyle « Ferrat chante Aragon » à la maison!
Pickwick 14 mars
@ Keisha : c’est vrai qu’il reste moins connu que Brassens ou Moustaki… Je l’associe à mon grand-père pour toujours, je crois que c’est pour ça que j’ai tant de peine aujourd’hui. Je me souviens qu’il m’avait expliqué le sens des paroles de ‘Bilan’ quand j’étais gamine. C’est aussi pour ça que j’ai choisi une chanson engagée !
Lystig 14 mars
aragon/ferrat = que de la poésie !
George 14 mars
encore une magnifique chanson…. merci !
L’Ogresse 14 mars
Sublime !
Bénédicte 14 mars
c’est très beau bon dimanche
Géraldine 14 mars
C’est un chanteur que je ne connaissais quasiment pas… A moins que je connaisse de ses chansons sans savoir à qui les attribuer…
Gabrielle 14 mars
Intense ! J’adore le jeu de l’ombre sur son visage quand il chante, très beau et triste à la fois. Merci !
La plume et la page 14 mars
On perd un sacré poète!
Pickwick 14 mars
@ Lystig : ici le texte est de Ferrat lui-meme, mais il a evidemment chanté Aragon magnifiquement aussi. Les hommages de la blogo l’ont bien rendu !
@ George : de rien! Il n’y avait que l’embarras du choix. Celle-ci est certainement dans les plus tristes, mais tellement ‘nécessaire’ à la mémoire.
@ L’Ogresse : il a écrit ce texte en hommage à son père mort en déportation si ce que j’ai lu est vrai. Comme tu le dis si bien, un texte tout simplement sublime.
@ Bénédicte : oui, c’est vraiment poignant. Ca ‘met les poils’ comme on dit…
@ Géraldine : c’est vrai qu’il était moins connu que Brassens ou Moustaki. C’est un choix qu’il avait fait aussi apparemment. Et puis un hommage est aussi l’occasion de (re)découvrir un artiste !
@ Gabrielle : c’est vraiment ce que j’ai ressenti en retrouvant cette archive ! Ravie que tu l’ai ressenti aussi.
@ La plume et la page : c’est vrai, il a chanté, mais aussi écrit lui-même de très beaux textes, comme celui-ci !
Canel 15 mars
Merci pour cette chanson bouleversante que je voulais ré-écouter « différemment », c’est à dire en sachant désormais que son père avait été victime des camps. Plus je vieillis, plus je regarde de films/lis de livres sur le nazisme, plus le sujet me touche.
anjelica 15 mars
Un chanteur que j’aimais bcp et que j’écoutais bcp à une époque.
Marie L. 15 mars
J’ai appris la nouvelle ce matin et que dire? Un grand homme s’en est allé… J’ai réécouté plusieurs de ses chansons aujourd’hui et elles trouvent un écho toujours aussi vibrant aujourd’hui… (Ca fait peur, d’ailleurs!)
Pickwick 16 mars
@ Canel : cette chanson prend vraiment une autre dimension ! Ce thème fait aussi partie de moi depuis la découverte des camps en Pologne en 98. Et si tu as des titres en tête sur la période nazie, je prends.
@ Anjelica : c’est fou comme il nous parle ce chanteur, il y a vraiment un charisme.
@ Marie L. : exactement, tu le dis très bien ! C’est justement pour ça que j’ai choisi ce texte. « On me dit à présent que ces mots n’ont plus cours, Qu’il vaut mieux ne chanter que des chansons d’amour, Que le sang sèche vite en entrant dans l’histoire, Et qu’il ne sert à rien de prendre une guitare (…) Je twisterais les mots s’il fallait les twister, Pour qu’un jour les enfants sachent qui vous étiez ». C’est malheureusement encore d’actualité, j’en ai bien peur…
Canel 16 mars
« L’origine de la violence » Fabrice Humbert, « Le non de Klara » Soazig Aaron (pas sûre de l’orthographe), « L’atelier », pièce écrite de Jean-Claude Grumberg, « Un secret » de Philippe Grimbert… j’en oublie.
Pickwick 17 mars
@ Canel : merci !! J’ai noté le Humbert chez L’Ogresse notamment. Je ne connais pas les autres titres, donc je note ! Et j’avais oublié, mais j’avais laissé tombé « Les Bienveillantes », ça n’était pas passé… tiens, je vais aller voir, il y a certainement des billets sur les blogs !
Je fini mon billet sur « Fuck America » sur ce thème également, je poste bientot !